30.4.10

Wellington




Retour en arrière, il y a une semaine, samedi dernier à Wellington. Enfin une vraie ville. Le centre a de la gueule, avec quelques pièces d'architecture récente digne de ce nom comme le Meridien sur le sea front, bâtiment "vert" en deux parties, l'une habillée de lamelles de bois côté nord (protéger du soleil, qui est au nord!), l'autre blanche et presque lisse sur le mer.

Il y a aussi un hôtel marrant, Museum Hotel (la pub dit que Picasso et Dali auraient aimé y séjourner...), bloc noir d'usage portuaire, qui était implanté près de la mer et a été bougé là sur roulettes. à l'intérieur, parait-il, de l'art contemporain.

Evidemment, le grand musée Te Papa. Massif et pas passionnant à l'extérieur mais très agréable dedans, avec quelques belles pièces, en particulier un grand Waka, bateau de guerre et de représentation.



Et des bâtiments anciens transformés, par exemple une ancienne caserne en galerie d'art maori...

et dans la partie plus business, l'ancienne banque de New Zealand transformée en centre commercial cosy et chic - des boutiques et un café au milieu.


Sur les collines, un petit air de San Franciso, avec des maisons assez charmantes sur les pentes, avec vues sur la mer d'un peu partout.



Pas trop de banlieue envahissante, une certaine densité centrale. Des rues dessinées.

Un peu de tout, assez bordélique. Comme le Backpaker où nous sommes restées une nuit avec Mathilde, ancien bâtiment administratif des services de l'immigration, à la façade zébrée.

Cuba Street, avec sa partie piétonne, ses boutiques pour jeunes.




Et de l'art public un peu partout.


Mathilde est rentrée à Auckland, je me balade sur le sea front, contente d'être seule. Un scottish en kilt joue de la cornemuse, des jeunes filles déguisées jouent les vampires.

J'achète des pendentifs en jade dans un petit marché, un pour moi, bâtonnet vert sombre, et deux pour des cadeaux. Le soir, Vicki m'emmène chez sa "soeur" (fille de la femme qui l'a élevée, alors que sa mère biologique l'abandonnait): fin de partie, une femme très saoule (et étonnamment laide) tire des bouffées d'une fausse cigarette, il reste des gâteaux (chocolat blanc et cheese cake à la framboise, surmontés d'un petit papillon en chocolat rose) et du vin blanc, sauvignon fort bon (ici ils disent "sauv"), à caudalie cacaotée (ou bien est-ce à cause du chocolat qui l'accompagne?). Un très beau jeune homme, Maori d'évidence, accepte (sur la recommandation de Jodie) de bénir mon pendentif (d'autant plus recommandé qu'il n'est pas bon de s'offrir à soi-même une green stone), quelques gouttes d'eau au-dessus du lavabo de la salle de bain, une prière en maori et une en anglais, pour m'assurer un bon voyage et bénir ma famille, ma fille, mon arbre généalogique... Il y a chez ce jeune homme une grâce qui donne de l'émotion à la bénédiction.


La veille, vendredi, c'était ballade dans Wellington, au soleil, avec la pimpante Sally, arrivée du Cheshire au début des années 50, vifs 73 ans aujourd'hui. Elle avait postulé comme infirmière à Wellington sans prévenir sa mère, alors qu'elle n'était pas majeure: elle est passée par le curé pour la convaincre de signer les papiers... En 1954, ici c'était comme un pays de western. Ensuite elle s'est mariée; à un John infidèle à qui elle a appris à danser. Elle aime toujours danser mais a fini par se séparer de John, parce que décidément elle n'aimait pas partager.
En ville, elle achète un "poppie", coquelicot en papier porté en boutonnière pour Anzac Day, le jour de mémoire pour les tués et blessés de la première guerre mondiale.

Elle m'emmène au jardin botanique, qu'elle a arpenté des centaines de fois avec ses enfants, et parle des fleurs avec enthousiasme, une pointe de désapprobation lorsqu'elle constate que le jardin d'herbes odorantes consacré à Katherine Mansfield (née et grandie aux abords) n'est pas bien entretenu. Drôle comme elle est british, encore. Comme la dame du Lodge de Havelock, délicieuse anglaise cultivant le jardin de son motel avec entrain – des fleurs partout, même dans les recoins sombres. En riant, elle raconte ses efforts pour prendre la tonalité locale, sans succès, et comment les kiwis se moquent de son accent. Elle dit à Mathilde combien elle comprend son désir de rester ici. Une troisième, rencontrée sur une aire de repos pendant un trajet en bus, venue du Pays de Galles il y a trente ans, mariée à un kiwi, dit n'avoir jamais regretté de vivre ici, où elle a été plus libre qu'elle ne l'aurait été en Grande-Bretagne. « New Zealand has been good to me. » Johanna, mon hôte Couchsurfing de Turangi, venue des Pays-Bas, partage exactement cette idée. Pas étonnant si on se souvient que la Nouvelle-Zélande a été le premier pays à instituer le droit de vote aux femmes (1893!)Aujourd'hui, il suffit de regarder le journal télévisé (pas pour la qualité des news, très "chiens écrasés")pour se rendre compte que les femmes occupent dans la vie sociale et politique une place à égalité. Les salaires aussi, semble-t-il.

29.4.10

Jump with Tiger



L'aventure commence quand John vient me chercher dans son auto : "my baby" dit-il, en fait, une vieille dame, née en 1921, qui grimpe les côtes en soufflant mais arrive tranquille à l'aéroport. John a le visage d'un grand brûlé, les mains, sans doute le reste du corps, survivant d'un crash, de retour dans les airs après des années qu'il raconte dans un livre "Just shut-up & jump", il a fondé la petite compagnie qui vend les skydive en tandem à Tauranga. A côté d'elle, les compagnies de Taupo ressemblent à des industries (moins cher, c'est vrai : 250 $ au lieu de 320 à Tauranga)! Ici, je saute seule, avec Tiger, qui m'explique tout en détail plusieurs fois. Où mettre les pieds, comment tenir le menton, s'arquer comme une banane au moment de sauter, crier joyeusement en ouvrant les bras, pour ne pas avoir peur et laisser s'ouvrir le corps et l'esprit... "La peur, c'est mon boulot, dit-il. Il faut garder la peur pour continuer à respecter ce qu'on fait."
Il s'appelle Tiger depuis qu'à 6 mois son frère ainé l'a appelé ainsi. Il a vécu au Japon, épousé une Japonaise, parle japonais et dit que les sonorités ressemblent au maori...
Pendant qu'il fixe mon arnachement, je me sens comme un chevalier, avec son heaume, son armure.

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Là-haut, c'est sublime. Le coucou grimpe lentement jusqu'à ses 12 000 pieds. La peau de la mer brille, tous les bleus, tous les verts. Trop à contempler pour avoir peur. à peine la pensée, vite chassée, que je n'ai rien à faire là... A 12 000, la porte est ouverte, je fixe le bonnet, les lunettes. Penser à poser correctement les pieds sur la petite marche, attendre les ordres et me laisser pousser. Ensuite, jubilation. Le froid dans les doigts, je rigole et je n'arrive pas à fermer la bouche. Ouvrir les bras, planer. La terre, la mer, sont très loin. Et puis Tiger ouvre le parachute, tout se calme, je peux relever les lunettes, nous faisons des cercles en descendant lentement, le monde a l'air d'une maquette, avec des voitures comme des jouets. L'air est salé. Lever les jambes et atterrir sur les fesses. Béate. Impression de ne pas pouvoir me mettre sur mes pieds mais si, le corps flotte, léger. Et cette sensation de légèreté va durer encore un bon moment. ça danse à l'intérieur.

27.4.10

Sounds





Un réseau de montagnes aux vallées glaciaires envahies par la mer, en partie aussi creusées par elle. La géographie évoque les fjords nordiques, en plus douce, moins encaissée. Et aussi les lacs italiens. L'étrangeté vient de ce que les montagnes soient moins élancées que dans les Alpes et beaucoup plus pelées, comme si l'eau était montée plus haut.
Fjord et sound sont cousins, l'un creusé en forme de V, l'autre de U.





Le ferry qui quitte Picton pour Wellington navigue pendant plus d'une heure dans les sounds, s'approchant parfois de façon spectaculaire de la montagne avant de tourner dans la vallée suivante. Ce bateau vient de France raconte le marin qui nous invite, Mathilde et moi, à visiter le poste de commandement – son père était français (et ingénieur) : il a traduit tous les papiers du bateau lorsque la compagnie l'a acheté.

oiseaux à Kaikoura





Albatros, beaudelairien: alors qu'il marche sur l'eau pour prendre son envol, les passagers du bateau rient.

Cétacés (dit la baleine)





Pour les animaux marins, nous sommes allées à Kaikoura. L'objectif, c'était rencontrer une baleine. Un bateau nous conduit jusque dans la zone où deux sujets ont été repérés ce matin (avec l'aide d'un hélicoptère), deux mâles forcément car les femelles vivent loin au nord, dans des eaux plus chaudes. Les mâles restent là, souvent une trentaine d'années, on les connaît, ils ont des noms. Celui que nous chassons ce matin s'appelle Big Billy. Mais il plonge juste quand nous arrivons... Une quarantaine de minutes à l'attendre, c'est le temps moyen d'une plongée. Les albatros font le spectacle autour du bateau et le mal de mer menace à force de faire le bouchon. Une jeune femme immerge de grands écouteurs qui repèrent les vocalises de Big Nicky (à cause de son gros cou, parait-il, Nick for neck...), en train de remonter vers la surface. L'animateur fait vibrer le suspens et promet un intense encounter. Quand la baleine fait surface, le bateau fonce à sa rencontre. Mais l'animal ne reste pas longtemps en notre compagnie – il replonge au bout de quelques minutes, au lieu de la quinzaine habituelle. Juste le temps de photographier un petit souffle et une queue qui disparaît. La compagnie Whale Whatch nous fera cadeau de 20% du billet pour dédommager la déception. Un film projeté dans la cabine explique le système hydraulique qui permet aux cétacés de plonger: il ont dans le nez une cavité où deux tonnes d'huile (plus légère que l'eau) fait ballon pour rejoindre la surface. Quand la bête veut descendre, l'huile est envoyée dans les chairs, où elle se solidifie. Foutue huile qui a conduit les humains à chasser les baleines jusqu'à les menacer d'extinction.





Sur la route du retour, nous rendons visite aux dauphins, installés à la limite des hauts fonds et des fonds sablonneux – limite des eaux bleu intense et vert céladon. Artistes, ils émergent à cinq pour saluer le bateau, jouent entre babord et tribord, sautent, et nous sommes tous comme des enfants à courir d'un côté de l'autre en poussant des cris de plaisir. Étrange comme voir un dauphin rend heureux – j'avais ressenti la même joie tranquille sur la mer Rouge.



à Kaikoura, il y a aussi une colonie de phoques. Mais ce jour-là, un seul assurait, paresseux dans les rochers. Des kayaks se sont approchés de lui, il a joué un peu à cache-cache avec eux.

Akaora




À la recherche d'une auberge recommandée par les guides – mais fermée, la haute saison est finie – nous avons traversé la presqu'île jusqu'à Lebons Bay puis retour à Akaroa. Au fin fond de ce fjord, une colonie française a tenté de s'implanter au 19e siècle, vite récupérée par la Couronne britannique et envahie par les anglophones. Mais elle a laissé des noms aux lieux – exemple, la rue principale s'appelle Lavaud. Le 3e samedi d'octobre, Akaroa essaie de devenir française, elle organise des rassemblements familiaux, des dégustations de vin, une course d'escargots « entraînés » et une course de garçon de cafés...


Le fjord héberge aussi des dauphins, les plus petits du monde. Mais nous ne les avons pas vus.

Akaora presqu'île




Moutonnements de la montagne à moutons. La presqu'île est spectaculaire, montagne veloutée, sculptée par d'innombrables vallées, partout la mer surgit. Peu d'arbres sur ces pentes herbues, quelques sujets isolés, ébouriffés par le vent, des troncs blancs comme frappés par la foudre, même un champ de souches blanches – elles m'évoquent les dents que Cadmos jette au sol, se transformant en soldats, qui s'entretuent, jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'une poignée, les hommes avec qui Cadmos fonde Thèbes. Je voulais demander à un autochtone pourquoi ces arbres foudroyés, j'ai oublié. Finalement, la réponse est venue plus tard : ce sont les opossums qui s'attaquent aux arbres, dévorent leurs feuilles et parfois leur écorce, massacrent des forêts entières. Les "possums" sont devenus une calamité dans le pays, charmants marsupiaux importés d'Australie par des élevages pour leur fourrure, mais relâchés dans la nature quand l'activité n'a plus marché. Sans prédateurs, ils se sont développés au point de faire l'objet d'une polémique majeure : faut-il les empoisonner massivement? Certains craignent que cet empoisonnement touche les eaux et les autres animaux, d'autres estiment que les nouveaux poisons, à durée de vie limitée (quelques semaines), ont fait la preuve de leur efficacité là où ils ont été testés, permettant aux forêts et aux oiseaux de se développer...





Partout, évidemment, des moutons. Quasi invisibles sur la photo, ton sur ton avec l'herbe pâle. Les points noirs sont des jeunes bœufs, des Angus (race la plus courante ici pour la viande de qualité, avec les Hereford), pas bien gras mais agiles, qui grimpent les pentes aussi facilement que des chèvres.

Christchurch





Beaucoup d'espace libre, comme dans le nord (la Nouvelle Zélande ne connaît pas la densité), quelques rares bâtiments hauts dans le centre minuscule. Mais ici l'espace public existe, rues très plantées, organisées en grill, que les méandres de la rivière Avon (so british...) traversent avec paresse. Ses berges, jardinées généreusement et plantées de grands arbres (beaucoup de saules pleureurs), dessinent un jardin continue qui serpente dans la ville. Ambiance européenne, presque scandinave, carte postale tranquille qui n'a pas l'air trop réelle, un peu surannée avec ses morceaux d'architecture victorienne, quelques pièces contemporaines – en construction, voisin de l'emblématique HSBC, le bâtiment en construction de la mairie s'annonce "vert". Tout est si calme.

26.4.10

vallée


Dans la vallée, à l'approche de Christchurch, beaucoup de brise-vent, trop serrés, comme dans la vallée du Rhône.

l'île sud




Vue d'avion, l'île sud, très montagneuse, montagne à moutons (comme on dit "montagne à vaches" en Suisse), pelée et jaune, avec de grands triangles de velours vert sombre, forêts de résineux sans doute cultivées. Quelquefois, un arbre isolé, torturé par le vent.